Nouveau titre : Musique : aux confins de la folie avec Saodaj
"Foli", le dernier titre entièrement composé par les musiciens de Saodaj et co-écrit avec Carlo De Sacco du groupe Grèn Sémé, sort ce vendredi 8 mars 2024. Univers explosif et rythmes envoûtants pour une plongée dans un tourbillon mêlé d’angoisse et de joie. Où se situe notre folie ? Entre l’obéissance et la transgression ? L’amour et la haine ? La résistance et le renoncement ? Entretien avec Marie Lanfroy qui interroge notre rapport à la réalité et à la normalité (photos DR).
- Est-ce un hasard si "Foli" sort un 8 mars, journée internationale qui célèbre les droits des femmes ? Et pourquoi ce thème de l’absence de raison ?
À la base ce n’était pas voulu mais en y réfléchissant, je trouve la symbolique du 8 mars assez géniale. Quant à la thématique, la folie nous concerne tous parce que durant notre vie, nous pouvons être amenés à traverser des moments difficiles ou en tout cas, à être sur le fil du rasoir, voire borderline, au risque de basculer dans la déraison. On ne sait jamais de quoi la vie est faite et selon les épreuves, on peut tous réagir de manière différente, plus ou moins intense. Ce titre évoque aussi plusieurs types de folie notamment celle du système dans lequel on vit, d’une société qui va beaucoup trop vite pour l’humain.
- Depuis que Saodaj compose, ses sources d’inspiration sont la liberté, le voyage, un enracinement qui vient du déracinement, et maintenant la folie. Comme un portrait un peu sombre de la société en somme…
Je trouve qu’aujourd’hui on n’a plus forcément l’opportunité de faire de grandes introspections sur nous-mêmes. Ce rythme de productivité va selon moi à l’encontre de celui de l’humanité et je pense nous devons prendre le temps de nous relier à la nature. Une grande majorité d’entre nous, moi y compris, en sommes trop souvent coupés, on a du mal à s’immerger en elle, à se reconnecter.
J’éprouve parfois ce sentiment d’être prise dans une sorte d’étau qui se referme, et d’être en total décalage, ce qui est générateur d’angoisse. Le fait d’avoir des enfants m’a fait replonger dans ma propre enfance et m’a donné cette envie de révolutionner le monde en quelque sorte, de le (re)penser, avec cette envie de tendre vers d’autres modèles plus équilibrés et vertueux.
- Choisir la transe et le corps pour évoquer un tel sujet coulait de source ? Les consonances sont aussi très rock…
"Foli" est très rock certes mais pour moi ce n’est pas tant un énorme virage parce que Saodaj ça reste la transe, ce fil conducteur qui ne lâche pas et qui préserve notre identité.
J’avais envie d’exprimer une pulsion de vie, de rage et en même temps de larguer le corps ! Souvent nous les adultes sommes enfermés dans nos propres corps, avec peu d’espace pour s’exprimer, on a de plus en plus de mal à oser se déployer… Ce morceau nous l’avons composé tous ensemble et c’est une première car jusqu’à présent, les compositions de Saodaj étaient réalisées par Jonathan et moi. "Foli" est donc à l’image du groupe et marque une évolution empreinte d’un sentiment de lâcher-prise et de liberté.
- Selon toi est-ce important d’avoir "un grain" comme on dit souvent ?
Je dirais même que c’est vital. Cette folie dans le sens bénéfique du terme, renvoie à celle de l’enfance. J’ai tellement de bonheur à voir mes enfants oser déranger l’ordre établi. J’estime qu’il faut se battre pour le garder en soi au risque sinon de tomber dans une forme de tristesse. Notre âme d’enfant c’est ce qui nous maintient et j’aimerais la garder tout au long de ma vie parce que le monde ne va pas super bien.
- Saodaj a co-écrit ce titre avec Carlo de Sacco de Grèn Sémé… Peux-tu nous en dire plus ?
J’ai toujours adoré Grèn Sémé et on se suit mutuellement depuis longtemps. Avec Carlo on s’est bien trouvé au niveau de notre créativité et il y aura sans doute d’autres collaborations. Il fait partie de ces personnes qui ont justement gardé leur âme d’enfant, et qui créent dans la joie. On parle tous les deux le même langage, on a beaucoup d’indignations communes même si nos combats sont différents. La collaboration est quelque chose qui m’anime et je reste toujours curieuse et intéressée par les autres, et dans l’EP à venir, il y aura un second titre avec Carlo. La Réunion est terre de métissage et métisser les musiques par le biais de rencontres entre artistes est important.
- Après une année 2022 chargée avec notamment la sortie du dernier album « Laz », quelle est l’actualité du groupe pour 2024 ?
Alors le clip de « Foli » sortira le 19 mars, on a aussi quelques concerts à venir ce mois-ci jusque début mai et après on part en tournée en métropole au mois de juillet durant trois semaines. Pour la suite, on aimerait revenir à l’auto-production et on réfléchit actuellement à la faisabilité du projet. Tout ce que je peux dire c’est que ce sera un EP qui sortira certainement en vinyle et probablement en fin d’année. Et s’il ne sort pas en physique, il sera en version numérique.
- Saodaj est une très belle aventure mais allier vie de maman et d’artiste n’est pas toujours simple. Quel est ton secret pour continuer de créer, semer les messages et partager ta passion ?
Pour moi Saodaj est à l’image d’un enfant qui grandit. Je donne autant d’énergie à ce projet que j’en donnerais à un enfant même si c’est pas facile tous les jours. Mais nous les femmes, sommes très courageuses !
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