Réunion par Imaz Press, mercredi 18 septembre 2024 à 16:28

La garde à vue de l’institutrice levée, l’enquête continue : Élève de 3 ans frappée : derrière la violence, la question de la santé mentale des professeurs

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Après la publication d’une vidéo montrant une institutrice frappant une enfant de trois ans dans l’Hexagone, la polémique continue d’enfler. Si les condamnations sont – bien heureusement – unanimes, nombreux sont ceux à souligner les difficiles conditions de travail du corps enseignant, dont certains sont "poussés à bout". Un argumentaire qui divise (Photo AFP)

Les images particulièrement violentes ont été filmées par la mère d’un élève le 3 septembre, à l'école maternelle des Frères Voisins, dans le 15e arrondissement de Paris, d’après l’AFP. L’enseignante a été immédiatement suspendue après la publication de la vidéo. Cette dernière, qui enseigne dans une école du 15e arrondissement de Paris, a été placée en garde à vue ce lundi 16 septembre 2024 avant finalement d'être relâchée.

Si les syndicats condamnent fermement l'action de cette institutrice, le SAIPER appelle à la mise en place "des Assises sur les violences au sein de l'école.

"On met souvent en lumière les conditions d'accueil des élèves, mais on ne voit pas l'autre côté du rideau, où les enseignants ne sont pas accompagnés, pas écoutés, pas valorisés", estime Gladys Robert, du SAIPER.

"C'est vrai que cette séquence c'est peut-être systémique de quelque chose d'autre. S'arrêter sur ce geste serait trompeur, car quand on décide de faire ce métier c'est parce qu'on adore les enfants", abonde Pierre Fourny, de la FSU.

"On ne se voit pas faire ce genre de choses, mais il y a tout un tas de problématiques qui font que certains en arrivent à sortir de leurs gonds. On le voit d'ailleurs chez des médecins, infirmiers, policiers : ce sont des gens tournés vers les autres, mais où la violence s'installe. Ce qu'il faut demander, c'est comment on en arrive là ?", estime-t-il.

"Le geste est impardonnable, mais ça serait bien qu'on puisse l'expliquer. Il faut au moins avoir conscience que tout à chacun ça pourrait nous arriver."

Depuis plusieurs années, les syndicats dénoncent l'effet "pas de vagues" qui régnerait au sein de l'Éducation nationale. "Il y a une répression sur les professeurs qui disent quelque chose. Et quand on est abimé par le travail, on abime les élèves. C'est un cercle vicieux, tout ce qu'on dit se retourne contre nous, et les gens se protègent donc vis-à-vis de la hiérarchie", dit Pierre Fourny.

"Le rectorat n'a pas de réponse, l'institution non plus, et c'est partout pareil en France. Les problématiques qui sont adjacentes, c'est symptomatique de notre société", abonde Gladys Robert.

"Il faut travailler avec les parents, parce que les enfants sont différents d'année en année, et il y a aujourd'hui des ruptures entre la maison et l'école. Il y a un travail de fond à faire avec les familles", assure-t-elle.

Alors que le ministère de l'Éducation nationale a demandé la "suspension immédiate" de l'institutrice incriminée, Pierre Foury pense que ce dernier a "pleinement conscience de la situation, mais on sous-investit tellement tous les services publics qu'ils ne fonctionnent plus aujourd'hui".

"On a un travail qui devient automatique, on se met en mode auto et malheureusement on se rend plus compte de l'état de fatigue dans lequel on plonge. Sauf qu'on se fait énormément de mal, et cette violence peut se retourner contre le plus faible", regrette le syndicaliste.

Gladys Robert regrette elle que "tout le monde la lâche". "Si on fait un pas de côté, on chute. Un parent qui vient et qui agresse il n'y aura pas de réponse concrète", accuse Gladys Robert.

- "Ne pas attendre de perdre le contrôle" -

Du côté du rectorat de La Réunion, la condamnation est unanime. "Ce n'est pas une question d'élèves difficiles, il s'agit ici d'un cas exceptionnel. Ce qu'on apprend aux enseignants, c'est qu'on ne touche jamais un élève, point. On peut avoir des enseignants qui ont du mal et qui sont à bout mais dans ces cas-là, il faut se dire que l'enseignant n'est jamais seul" assure l'Académie. "Il faut toujours se tourner vers ses collègues, il ne faut pas attendre de perdre le contrôle."

Du côté des parents d'élèves, aucune excuse ne peut justifier cette violence. "Je ne suis pas surpris que des enseignants défendent des enseignants, mais il faut arrêter de couvrir ce genre de faits", lance Daniel Amouny, président départemental de la Fédération des Conseils de Parents d'Elèves (FCPE).

"Il n'y a aucun motif qui justifie un tel acte de violence envers un enfant. Il est inadmissible, nous sommes face à des adultes formés et professionnels. On ne peut pas admettre qu'un enfant de trois ans soit frappé", insiste-t-il.

"Je rappelle que dès qu'un enfant ou parent d'élève pète un câble, tout le monde lui tombe dessus, et personne ne se demande s'il y a circonstance atténuante. Mais quand c'est un enseignant on trouve toujours une excuse" accuse le parent d'élève.

"Il faut que les enseignants acceptent d'ouvrir les yeux sur les brebis galeuses. Nous, en tant que parents d'élèves, on dit aux parents quand ils ont dépassé les bornes, mais les professeurs ont du mal à le dire à leur collègue", estime-t-il.

Pour ce dernier, "on peut se poser la question de ce qu'il se serait passé s'il n'y avait pas de vidéos". "Malheureusement, il y a des situations qui sont cachées, cette enseignante était déjà visée par une plainte et la mère n'avait pas été écoutée. Quand on entend cette directrice dire que "elle ne l'a pas tuée", c'est révoltant. Faut-il attendre qu'il y ait un mort", s'indigne Daniel Amouny.

"On parle de violences dans la société, dans les familles, et on devrait fermer les yeux sur celle des enseignants ? Elle doit être combattue, dénoncée, il faut arrêter de se défausser sur les autres. Ils sont formés, c'est leur métier, on leur confie nos enfants", martèle-t-il.

"Nous défendons les enseignants, quand c'est défendable, mais nous n'excusons pas l'inexcusable. On monte toujours au créneau pour dénoncer le manque de moyens, le mal-être des enseignants, nous continuerons à le faire mais on ne peut pas accepter ce qu'il s'est passé", souligne ce dernier.  

Il l'assure, "nous ne mettons pas tout le monde dans le même panier". "La violence gangrène notre société dans toutes les strates. Et les enseignants ne sont pas épargnés", conclut-il.

Cette affaire met en tout cas en lumière plusieurs problématiques : la santé mentale des enseignants, de plus en plus dégradée. Mais aussi les défaillances de l'Éducation nationale quant aux comportements de certains de ses membres, l'institutrice en question ayant déjà été accusée de violences. La violence des élèves, elles, est aussi en augmentation.

Au fil des réformes, de moins en moins de jeunes se tournent vers cette carrière, et l'état de l'école publique ne cesse de se dégrader.

"Nous sommes tellement loin de l'objectif, il faudrait diviser les classes par deux, mais il n'y aura pas assez de professeurs", regrette Pierre Fourny. "C'est un travail de longue haleine, et on n'y arrivera pas tout seul. On peut donner des idées mais c'est aux citoyens de décider."

Dans ce contexte, le SAIPER appelle à l'organisation immédiate d'Assises de la violence, pour tenter d'endiguer un phénomène qui ne peut que s'aggraver si rien n'est fait.

A La Réunion, un enseignant a été suspendu en 2023 après avoir levé la main sur un de ses élèves lors d'une sortie pédagogique. C'est lors d'une sortie pédagogique jusqu'à l'Étang-Saint-Paul que les faits se sont déroulés. Des élèves auraient lancé des cailloux dans le dos de leur enseignant. L'un des projectiles aurait atteint le professeur au niveau de la tête. Un élève se serait alors mis à rire. Un comportement qui aurait exaspéré l'enseignant qui aurait fini par porter un coup à l'élève.

Quelques jours plus tôt, une surveillante de l'école primaire Alice Hoareau de Salazie avait porté des coups à un élève et été mise à pied par la commune dont elle dépendait administrativement. En parallèle, une enquête a été ouverte pour déterminer les circonstances exactes des faits.

www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

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